FRANCAIS

L'histoire en tant que science et champ d'études est en pleine mutation.
Grâce aux apports constants de l'archéologie, de la génétique, ainsi qu'à la confrontation avec d'autres sciences humaines (anthropologie, sciences sociales) ou "sciences dures" (démographie, biologie, statistiques) ce que l'on pensait acquis sur l'histoire et la généalogie des peuples est constamment enrichi et remis en question.
Ce blog a pour objet d'informer sur certaines découvertes qui modifient (ou pourraient modifier) nos connaissances sur nos ancêtres, des premiers homo sapiens jusqu'à nos grands-pères...


ENGLISH

History as a science and a field of study is undergoing significant changes.
Thanks to the contribution of archaeology, genetics, as well as exchanges with other human sciences (anthropology, social sciences) or "hard sciences" (demography, biology, statistics), historical and genealogical facts that were once considered to be established or "written in stone" are now being questioned, revised and enriched.
The aim of this blog is to inform and discuss current discoveries that modify (or could modify) what we know about our ancestors, from the first homo sapiens to our grandfathers...



mardi 20 décembre 2016

Les amateurs d'histoire sur You Tube

article publié dans "Le Monde" du 16 décembre 2016

Professeurs, étudiants, amateurs... ils refont l’histoire sur YouTube

Après la physique, la littérature ou le cinéma, les chaînes de vulgarisation historique sur la plateforme de vidéos rencontrent aussi leur public.
LE MONDE | • Mis à jour le | Par
             

Sur la chaîne YouTube « Confessions d’histoire », des acteurs dirigés incarnent des personnages historiques tels que Jules César, Vercingétorix ou encore Aliénor d’Aquitaine.
Jeune doctorante en histoire qui relooke les stars de la mythologie, personnages inspirés de l’humour Kaamelott (série télévisée sur la légende arthurienne) défilant dans un confessionnal de téléréalité, professeur beau gosse ironique qui aborde néanmoins des sujets sérieux... Les chaînes d’histoire se sont multipliées depuis 2014 sur la plateforme de vidéos YouTube, s’inscrivant dans le même mouvement que les chaînes de vulgarisation scientifique (« E-penser » ou « DirtyBiology »), littéraire avec les « booktubeuses » et philosophique (« Coup de phil »). Professeurs, étudiants ou encore amateurs se mettent ainsi en scène pour raconter l’histoire, la vulgariser, la rendre sexy.  
« C’est une tendance forte qui se confirme en France. Depuis quatre ans, les contenus d’éducation ont émergé sur YouTube et ont rencontré très rapidement leur public, même les chaînes qui ont des sujets de niche. Il existe aussi des chaînes outre-Atlantique mais on peut dire que cet engouement est une spécificité française », explique Charles Savreux, responsable de la communication de YouTube France.
Benjamin Brillaud, créateur de la chaîne Nota Bene en 2014, peut désormais compter sur plus de 438 000 abonnés. Ce ne sont pas les dix millions d’abonnés de l’humoriste Cyprien, mais il s’agit des mêmes codes : humour, dérision, détournement et interactivité via les commentaires des « viewers », ces spectateurs de YouTube.
« L’histoire, ça peut être chiant, je tenterai de vous transmettre ma passion à travers des anecdotes toujours plus croustillantes les unes que les autres, et sans vous gaver de dates », annonce en toute transparence Benjamin Brillaud dans la bande-annonce de sa chaîne, qui veut se démarquer du ton professoral. « L’histoire qui fonctionne et qui attire, c’est l’histoire anecdotique, pas l’histoire problématisée telle qu’elle est pratiquée par les historiens », confirme Julia Bellot, auteure d’un dossier sur ce sujet pour le magazine L’Histoire.

Vidéos parfois utilisées en classe

Comme Benjamin Brillaud, Ugo Bimar n’est pas historien de formation. Il est l’auteur d’une websérie humoristique « Confessions d’histoire » qui parodie l’émission de téléréalité de TF1 « Confessions intimes ». Dans une interview, l’auteur affirme que dans ses vidéos, rien n’est inventé, « tout est sourcé ». « Lorsqu’il y a des sources contradictoires, c’est simple, je prends celle qui me fait le plus marrer. » Quitte à perdre sa crédibilité ? « Cette chaîne se différencie car elle s’éloigne des codes internet et parodie ceux de la télévision. L’auteur n’en fournit pas moins un travail de source très sérieux », juge Julia Bellot.
Un travail qui peut être parfois utilisé en classe par les professeurs. Karl Zimmer, enseignant d’histoire-géographie dans un lycée du Mans, utilise certaines chaînes YouTube comme matériel pédagogique. « Il y a plusieurs façons d’utiliser ces vidéos, elles peuvent être en introduction d’un cours magistral, à visionner après les cours pour aller plus loin, ou avant les cours, selon le principe de la classe inversée », détaille-t-il.
Voici quelques chaînes que nous vous avons repérées :

Confessions d’histoire

C’est l’une des chaînes qui n’adopte pas le code YouTube du stand up filmé chez soi. Ici, ce sont des acteurs dirigés qui incarnent des personnages historiques tels que Jules César, Vercingétorix, Aliénor d’Aquitaine, etc. Le parti pris de l’auteur, Ugo Bimar, est celui d’une vraie websérie très inspirée par l’humour de Kaamelott et ses chevaliers bras cassés. Les monologues sont savoureux et les épisodes bien construits. Extrait d’un monologue d’Aliénor : « Pire qu’un moine ce Louis, nous dans le sud, on aime, la fête, la vie et le vin », lâche « la peste » d’Aquitaine. Ou Louis VII, qui tente de récupérer sa belle avec cette phrase devenue mythique « Aliénor si tu reviens j’annule tout ! ».

Nota bene

Quel professeur a déjà évoqué en cours la vie privée des papes ? Peut-être un peu trop risqué, si l’on en croit cet épisode de Nota Bene : « les cinq papes les plus rock’n’roll de l’histoire ». Benjamin Brillaud, star des youtubeurs d’histoire, y détaille en effet la vie romanesque des souverains pontifes. On y apprend qu’Etienne VI (896-897) a intenté un procès à Formose, son prédécesseur qui avait la caractéristique principale d’être déjà mort… que Serge III (904-911) a eu une maîtresse de 13 ans, Marozia, ou que Jean XII (955-964), considéré comme l’un des pires papes de l’histoire, préférait faire la guerre et coucher avec les femmes de ses rivaux, de ses amis, sa nièce ou la compagne de son père.

Parlons Y stoire

Pour plus de sobriété, voici l’œuvre d’un professeur alsacien qui en plus d’enseigner l’histoire-géographie réalise des vidéos, comme autant de compléments audiovisuels de ses cours. Dans un registre plus classique que les autres youtubeurs d’histoire, Baptist Cornabas travaille sur une narration précise sur fond de cartes géographiques et vidéos.

C’est une autre histoire

La « réception de l’Antiquité » ne vous évoque rien ? « Non ne zappe pas ! », exhorte Manon Bril, la youtubeuse de 28 ans qui tutoie son « viewer », partage ses codes, sa langue et sa pop culture, pour lui expliquer comment les figures de la mythologie ont été réinterprétées au fil du temps. Cette doctorante à l’université de Toulouse innove en se filmant à l’extérieur devant des murs tagués et sur fond de hip-hop. Extrait de l’une de ses vidéos : « Cette fois-ci, c’est Aphrodite qu’on va relooker. Et on va commencer par casser certains clichés gnangnan sur la déesse, parce que l’amour OK, mais là c’est de cul dont il est question. Et même de violence. Bref, couchez les enfants et démarrez la vidéo ! »

On va faire cours

Un prof beau gosse, sorte de Frédéric Beigbeder aux cheveux mi-longs, chemise et veste cintrée, Monsieur Baf, n’arrive pas faire son cours parce qu’il est sans cesse interrompu par ses étudiants. Ainsi, un cours qui devait porter sur « la circulation des tissus peints du Pacifique en Normandie de 1748 à 1801 » se transforme en longue digression sur l’Ordre des Templiers, avec pour point de départ les gros arrangements avec l’histoire du film Benjamin Gates et le trésor des Templiers. Extrait : « C’est sûr qu’un moine en bure qui fait du fromage ça fait vachement moins rêver les scénaristes qu’un BG [beau gosse] en armure qui se bat au nom de Dieu ».