La
généalogie, c’est à la fois le plaisir de remonter le temps et de mêler petite
et grande histoire, mais c’est aussi l’ancrage et l’attachement à une famille,
un réseau social, un lieu. Se trouver quelques ancêtres nobles parmi tous nos
laboureurs, journaliers, marins, bateliers, artisans ou ouvriers, c’est donc souvent
l’heureuse surprise qui satisfait toutes ces attentes à la fois. Après tout, l'objectif premier du/de la
généalogiste n’est-il pas souvent de développer son arbre le plus loin
possible ? L'avantage (et donc l'attrait) des ancêtres nobles est alors qu'ils
permettent généralement des remontées plus anciennes (et plus fournies en actes
divers) que pour la très grande majorité de nos ancêtres.
En 25 ans de recherches essentiellement
consacrées au Nord et au Pas de Calais avec la Belgique voisine comme élément
d’exotisme, sinon culturel du moins linguistique, j’ai croisé un certain nombre
de filiations nobles. J’ai toujours eu le sentiment que certaines zones
(Boulonnais, Audomarois, Douaisis et Weppes en particulier) semblaient plus
favorisées que d’autres de ce point de vue. Ainsi, alors que le Ferrain est la
terre d’élection des censiers, on y croise très peu de filiations nobles alliées
parmi ces derniers. Au-delà d’une analyse prosopographique, socio-culturelle,
économique et juridique qui pourrait pointer certaines caractéristiques
favorables ou défavorables à cette présence, il m’a toujours semblé qu’il s’agissait
surtout d’une inégalité des zones géographiques au regard des archives
disponibles. Les guerres en tout genre et à toutes époques ont charrié leur lot
de destructions mais le premier conflit mondial a eu des conséquences
particulièrement désastreuses pour la région de Bailleul et d’Hazebrouck par
exemple. Les rattachements potentiels à la noblesse disparaissent alors en même
temps que les sources…
Il
existe cependant un certain nombre de voies généalogiques connues vers les
familles nobles de notre région que l’on retrouve dans les documents existants,
que ceux-ci soient des actes originaux ou des sources secondaires,
principalement des manuscrits et études d’érudits à travers les siècles. Je
n’ai ni l’intention ni la capacité de recenser toutes ces voies connues comme
les BOURNONVILLE et leur descendance (du BLAISEL, de CAMPAGNE, de LENGAINE, de
COUVELARD, de PARENTY etc.), ainsi que les CREQUY, de CALONNE ou de BONNIERES
dans le Boulonnais, l’Audomarois et le Montreuillois, les BAILLIENCOURT dit
COURCOL, de BASSECOURT/du PEAGE, de BOISLEUX ou DORESMIEUX en Artois, les
LESAIGE/de WISQUETTE pour le Douaisis, les de HAYNIN pour le Valenciennois, les
de RECOURT pour le Cambrésis, les JEROON, de WULF, de MORBECQUE, de VICQ/MUISSART
ou van PRADELLES/MAES de PALMAERT en Flandre, les de LANDAS ou CROIX dit DRUMEZ
dans la région lilloise, les de THIEFFRIES pour la Pévèle etc.
Parmi
ces filiations, certaines sont assez assurées mais déjà suffisamment connues
pour ne pas faire l’objet d’un article. Pour d’autres, leur
« renommée » n’est pas
toujours gage de fiabilité et plusieurs de ces rattachements, en particulier
lorsqu’ils se produisent à des périodes bien antérieures aux actes notariés ou
registres paroissiaux, ont des « faiblesses » sur lesquelles beaucoup
de généalogistes ne souhaitent pas s’étendre. Il s’agit d’un écueil courant
dans les recherches sur les familles nobles. L’intérêt qu’elles suscitent, pas
toujours pour les meilleures raisons, a nourri tous les travers de la recherche
historique et généalogique : filiations basées sur des documents sciemment
contrefaits ou inventés, filiations de complaisance ou imaginaires,
rapprochements indus sur la base du patronyme, de l’héraldique ou de la
géographie, et j’en passe…
Dans
cet article, mon objectif est plutôt de m’attarder sur quelques rattachements
nobiliaires qui seraient à la fois relativement méconnus, provenant des
diverses zones géographiques de notre région, généalogiquement très intéressants,
avec une descendance avérée dans le monde des laboureurs, et suffisamment
solides en termes de fiabilité du fait de la validation de ces filiations par
des actes originaux issus des registres paroissiaux, des archives notariales,
des états de biens et maisons mortuaires ou des registres de bourgeoisie.
Je
vous invite ainsi à vous promener avec moi sur quelques « ponts en pierre"
vers le Moyen-Âge….
***
Jeanne de BERSACQUES °ca1545
+p1595a1610 (Blendecques)
A
tout seigneur tout honneur, je commencerais de manière très immodeste en
présentant une filiation que Didier Bouquet et moi-même avons découverte en
2011 sur une branche ignorée jusque-là de la famille de BERSACQUES. Les travaux
de Michel Champagne avaient posé les fondations mais il a fallu deux actes
découverts par Bernard Chovaux pour consolider ce rameau et élargir le cercle
des descendants de cette famille.
Un soir d’août
2010, en consultant les actes du Gros de St Omer pour l'année 1610 relevés par
Bernard Chovaux je tombais sur un partage de famille où est citée parmi les
enfants de Gilles HERZELLE et Jeanne de BERSACQUES, Françoise HERZELLE mariée à
Pierre HAMBRE. Cet acte m’intéressait au plus haut point puisque je descendais
de ce couple marié à Blendecques le 07/10/1606 (avec contrat de mariage à Saint
Omer).
Une fois établi
le rattachement familial aux BERSACQUES, il fallait maintenant reconstituer la
filiation exacte de Jeanne. Didier Bouquet descendant du même couple, nous fîmes
effort commun. Deux actes trouvés par Bernard Chovaux dans les comptes
anniversaires et les terriers de Bilques confirmèrent que Jeanne était fille de
Pierre dit Porrus de BERSACQUES ce qui, confronté aux travaux précédents de
Michel Champagne faisant de Pierre dit Porrus un fils de Thomas et Marie de
LIANNES et un petit-fils de Jacques et Marie MUSELET dit de SAINT MARTIN,
permît de raccrocher une nouvelle branche au tronc commun des BERSACQUES.
Cette nouvelle
branche permet notamment aux couples Robert HERZELLE x Marie BOURSIER, François
HERZELLE x Antoinette DEHEGHE, Françoise HERZELLE x Pierre AMBRE ( et leurs
enfants Jeanne AMBRE x Jean FONTAINE, Marie AMBRE x Baudouin FRERET, Antoine
AMBRE x Jeanne TARTARE), tous de Blendecques, de se rattacher aux seigneurs de
Longvilliers, puis aux CAYEU et par ces derniers à Aalis de SAINT OMER fille de
Guillaume et Ide d’AVESNES, elle-même descendante des comtes de NAMUR et donc
de la dynastie carolingienne[1].
Mais
au-delà de cette nouvelle branche, de nombreuses familles se rattachent au
couple Jacques de BERSACQUES et Marie MUSELET par un autre de leurs fils, Philippe
qui, avec son épouse Jacqueline de WAILLY, eurent au moins 14 enfants connus.
Parmi ceux-ci on retrouve Adrienne de BERSACQUES x Nicaise PIERS (avec une
descendance par leurs enfants Jacqueline x Oste DEVINCQ, Lamberte x1 Guillaume
DELATTRE x2 Guillaume de le CREUZE, Gérard x Marie MASSEMIN, Marie x Pierre
DUPREY et Péronne x Jean DELATTRE), et Marguerite de BERSACQUES x Gilles ROELS
(et leurs enfants Marguerite x Jacques MASSEMIN, Jean x Gillette BREUS, Jeanne
x Mathieu EVERARD, Jacquemine x André RENGHIER, Allard x Marguerite de
BRAUWERE, et Mahieu). Mais on retrouve aussi une descendance par les familles WALLERICQ
et PENANT d’Eperlecques, ou les LEROY de Campagne les Wardrecques[2]
Raphaël MERCATELLIS °ca1443
+12/08/1508 (Douai)
La
deuxième filiation est l’une des plus intrigantes. Le duc de Bourgogne Philippe
le Bon eut d’une Marie de BELLEVAL, apparemment épouse de Jean de MERCATEL, un
fils qui, de manière surprenante, prit comme patronyme une variation du nom du
mari trompé ! A moins qu’il ne s’agisse d’une invention a posteriori pour expliquer ce nom de
famille particulier...
Ce « bâtard de Bourgogne », Raphaël
MERCATELLIS, nommé abbé de Saint Bavon à Gand et évêque in partibus de Rhosus en Syrie, eut deux enfants naturels avant de
mourir à Bruges en août 1508[3].
L’un des deux, nommé également Raphaël, vint s’établir à Douai (dont il acquit
la bourgeoisie en 1515) pour exercer la profession de médecin. De son épouse
Claire IMPENS il eut plusieurs enfants qui assurèrent sa descendance à Douai au
travers des couples Anne MERCATELLIS x Jean BRUNEL (et leur fille Philipotte x1
Jean BLONDEAU x2 Paul COUSIN), Jeannette MERCATELLIS x Jacques LANCRIN, ainsi
que Nicolas MARCATEL (professeur de médecine à l’Université et échevin de
Douai) x Guillemette de SOMMAIN (et leurs enfants Marguerite x Balthazar
LEBRUN, Anne x1 Pierre CHOPART x2 Adrien LEFEBVRE, et Jacques x Françoise de
RAISMES). Ces filiations peuvent être reconstituées grâce au tabellion de Douai
et aux registres de bourgeoisie de cette même ville. Cette descendance
illégitime de Philippe le Bon n’était pas inconnue des érudits puisque tant Hubert
Nelis[4]
que Patrick van Kerrebrouck[5] ou
Frederik Buylaert[6]
y consacrent quelques lignes sans s’attarder cependant sur les détails[7].
L’ascendance
de Raphaël est évidemment prestigieuse. Rappelons simplement que le duc
Philippe le Bon était fils du duc Jean Sans Peur et de son épouse Margaretha de
BAVIERE. Marie de BELLEVAL pour sa part serait fille de Jean de BELLEVAL et
Jeanne de FRICAMPS. Selon le marquis de Belleval qui avait écrit sur sa famille[8],
les BELLEVAL seraient issus des comtes de Ponthieu.
Philippe François de
BOURGOGNE °ca1641 +09/07/1702 (Marquillies)
Pour
poursuivre dans la lignée de la descendance illégitime des ducs de Bourgogne,
il me faut maintenant dire un mot de la plus proche de nous : celle de
Philippe François de BOURGOGNE et de son fils Balthazar Philippe François, tous
deux se succédant comme seigneurs d’Herbamez, et qui eurent à la toute fin du
XVIIe et au début du XVIIIe siècle une nombreuse descendance légitime et
illégitime, parmi lesquels plusieurs petits laboureurs, journaliers ou
cabaretiers, principalement à Marquillies mais également dans les villages
alentours, et cela notamment parmi les familles MAHIEU, BEHAGUE, BRUNEL ou
DEROUBAIX. L’existence et les évènements de vie de ces nombreux descendants (on
connaît au moins 8 enfants à Philippe François et 9 pour son fils Balthazar) peuvent
aisément être reconstitués par les actes des registres paroissiaux de
Marquillies et le tabellion de la châtellenie de Lille[9].
Philippe
François de BOURGOGNE était issu à la 7e génération de Jean de
BOURGOGNE, évêque de Cambrai et fils de la relation adultérine du duc Jean Sans
Peur et de Agnès de CROY. Parmi les autres familles de l’ascendance de Philippe
François, on peut noter les BRIOIS, BAILLIENCOURT, OLHAIN ou LE CANDELE[10].
Marguerite de NEDONCHEL
°1642-+p1675 (Bouvignies)
Pour
la filiation suivante, c’est un meunier et sa descendance qui devinrent les
protégés de la famille de NEDONCHEL, une attention portée par cette famille
baronniale qui est un indice supplémentaire dans un faisceau de présomptions
très étayées pour faire de Marguerite de NEDONCHEL, l’épouse de Pierre JOVENEAU,
la fille naturelle de Denis Georges de NEDONCHEL, baron de Bouvignies.
Le
24/12/1662 à Bouvignies devant notaire, Pierre JOVENEAU souscrit un contrat de
mariage avec Marguerite de NEDONCHEL. Le père de cette dernière n’est pas cité
dans l’acte, et la mère de manière incidente au détour d’une donation, mais un
ensemble d’indices sur deux générations permet de valider l’identité de
Marguerite comme fille naturelle du baron, déjà décédé au mariage de celle-ci.
Parmi ces indices on note que Marguerite est officiellement accompagnée pour la
signature du contrat par le bailli du lieu, homme de confiance du baron de
NEDONCHEL. Le nouveau baron et la mère de celui-ci, Bonne Victoire de
LANNOY, sont également présents
puisqu’ils signent l’acte de mariage. Bonne Victoire, épouse légitime du baron
décédé, fait une donation conséquente à la mariée avec qui pourtant elle n’a
aucun lien familial, les NEDONCHEL seront aussi parrains et marraines de nombreux
enfants JOUVENEAU etc. La pièce maîtresse du faisceau de présomptions est
néanmoins la mention de « Denis Georges NEDONCHEL » comme père de
Marguerite au contrat de mariage de 1688 du fils de cette dernière, Antoine
François JOUVENEAU, avec Marie Brigitte DENIS.
Je
renvoie à l’article de Roselyne Decreton-Carpentier sur son blog Ancêtres en Nord[11]
pour plus de détails sur cette recherche. On connaît six enfants de Pierre
JOVENEAU et de Marguerite de NEDONCHEL dont notamment Jean Baptiste x1 Anne
BACUS x2 Marie DEFONTAINE, Antoine x Marie Brigitte DENIS, Guillebert x Jeanne
BUSEIRE et Marie Louise x Nicolas COPLOS, censier «au village de Paluez près
Oisy ». Parmi leurs descendants respectifs on retrouve les familles
DESCAMPS et FIEVET de Bouvignies ou les BEAURY de Nivelle[12].
Pour
ce qui concerne par contre l’ascendance du baron NEDONCHEL, on notera entre
autres les familles de GRIBOVAL, de BERGUES, de GHISTELLES, de BAILLEUL, de
LIGNE, de CALONNE ou de MASSIET[13].
Claudine de CUINGHIEN
°ca1555 +entre 1640 et 1654 (Beaucamps Ligny)
Claudine,
fille de Daniel, seigneur de Bleckhuys, et de Barbe DU BOIS DE HOVES, eut pour
sa part une descendance de ses deux maris, Guillaume LEBRUN et Jean DENGLOS, à
la fin du XVIe siècle à Beaucamps Ligny. C’est le riche tabellion de la
châtellenie de Lille qui a permis de la reconstituer[14].
Au travers des couples Philippe LEBRUN x Martine DELAVAL, Pierre CARLIER x
Marie LEBRUN, Maximilien LEBRUN x1 Barbe LEPOIVRE x2 Louise SANTER, Floris
DEBARGE x Hélène DENGLOS et Jacques BIGOTTE x Pasque DENGLOS, cette descendance
se retrouve aussi dans les familles DESPLANQUE, DELEPLACE, BOUSSEMART, BONNEL
et CHARLET de Beaucamps.
Il
existait une incertitude sur la filiation maternelle de Gilles de CUINGHIEN,
grand-père paternel de Claudine, certaines sources imprimées en faisant le fils
bâtard de Gérard « le Grand » de CUINGHIEN, d’autres le fils légitime
de Gérard et de son épouse Jeanne de HINGETTES[15]. Le
Manuscrit 601 de la Bibliothèque municipale de Lille, qui répertorie les
généalogies de nombreuses familles de la châtellenie à partir de sentences de
noblesse, de lettres de chevalerie, d’extraits de registres aux cognoissances et de registres des plaids de la ville
de Lille, permet de trancher : Gilles était bien le fils naturel de Gérard[16]
et ne descend pas de Jeanne de HINGETTES dont je développerai l’ascendance dans
un prochain article.
On
retrouve donc entre autres dans l’ascendance de Claudine les familles du BOIS
de HOVES, de LONGUEVAL, de MORTAGNE, de THIENNES ou de WAVRIN.
Adrien François
FROMENTIN 28/12/1673-27/07/1752 (Arras)
Les
rejetons bâtards de familles nobles exerçaient tout le spectre des professions.
Ainsi, Adrien François FROMENTIN fût maître sculpteur avant de devenir marchand
épicier (!) Son père, qui portait le même prénom, était pour sa part seigneur
de Monchy au Bois. La similarité des noms et prénoms pourrait laisser penser que
le seigneur en question ne cherchait pas particulièrement à dissimuler cette
descendance. Il n’y avait en effet aucun embarras social puisqu’Adrien François
avait 20 ans et n’était pas marié lorsqu’un fils, aussi prénommé Adrien
François, naquit de sa relation avec Anne PETIT. Pourtant, l’enfant ne fut
probablement pas reconnu puisque sa filiation paternelle n’est précisée ni sur
son contrat de mariage de 1705 ni dans l’acte de mariage. La filiation est
cependant confirmée par la mention de sa naissance illégitime et du nom de son
père dans son relief de bourgeoisie d’Arras en 1698.
Adrien
François aura 13 enfants de son épouse Marie Anne DAMBRINES, d’où une
descendance dans l’Arrageois au travers des mariages de Marie Anne FROMENTIN et
André GAMOT, de Marie Guislaine avec Jean Baptiste LAVALLE, de Nathalie x
Antoine François DAMART, de Marie Madeleine x Jacques Joseph PERIN et d’Alexandrine
x1 Michel Joseph CAPELLE et x2 Jean Baptiste MOREL[17].
Quant
à l’ascendance d’Adrien François, seigneur de Monchy au Bois, on y retrouve
entre autres les familles DORESMIEUX, de WARLINCOURT, LE CANDELE ou OLHAIN.
Anne Marie de GHERBODE
°27/01/1627 +03/04/1663 (Comines)
Le
Ferrain, bien que disposant proportionnellement de moins de ponts vers le
Moyen-Âge pour les familles roturières, n’est pas complétement dépourvu pour
autant. Ainsi la famille de GHERBODE[18]
se retrouve dans l’ascendance de plusieurs familles de censiers et laboureurs
de la région au travers de l’alliance entre Pierre LOUAGE qui épouse Anne Marie
Marguerite LAUMOSNIER le 25/11/1678 à Comines, la mère de cette dernière étant
Anne Marie de GHERBODE. Celle-ci, fille de Nicolas, seigneur de la Haye et
d’Eeckhoute, et Catherine de BEYGHEM, devint la femme du militaire Jean
Baptiste LAUMOSNIER qui, une fois démobilisé en octobre 1648, revint à Wervicq
pour épouser la jeune héritière (elle avait 21 ans à son mariage).
Par
son père, Anne Marie de GHERBODE descendait entre autres des van HALEWYN/de
HALLUIN, de HAUDION, de LANDAS, de BETHENCOURT ou PAELDINC, famille échevinale
d’Ypres que j’ai étudiée dans un article précédent[19].
La
descendance LOUAGE se trouve pour sa part essentiellement dans les communes de
Comines, Wervicq, Langemark ou Zandvoorde, des deux côtés de la frontière
franco-belge, au travers des mariages Marie Madeleine LOUAGE x Josse LAGRANGE, Marie
Catherine LOUAGE x François CHARLEZ, Marie Françoise LOUAGE x Jean Baptiste CORDONNIER,
ou Anne Catherine LOUAGE x Pierre Jean LEWILLE.
Isabeau de SAINT GENOIS
°ca1610 +p1631 (Hénin-Liétard)
A
Hénin-Liétard, c’est Isabeau de SAINT GENOIS qui permit à ses descendants de se
relier à la noblesse du Moyen Âge. Elle y épousa le 1er mai 1631
Louis BILLEAU, laboureur. Une information apportée par Didier Bouquet confirme
qu’il s’agissait très probablement d’un mariage « réparateur »
puisque l’on trouve dans les registres d’Hénin la mention d’une naissance du
couple un peu moins de trois mois auparavant [20]! Ce
couple eut une postérité au sein des familles FROISSART, TAHON, LEROY, DEBOURS
et CAULLET de la même commune au travers des deux mariages successifs de leur
fille Cécile BILLEAU avec Mathieu FROISSART (en 1668) puis Jacques TAHON.
Isabeau
était fille de Jean Baptiste, seigneur d'Aigneaucourt et bourgeois de Douai, et
de Marguerite de la GLIZEULLE. Celle-ci était l’arrière-petite-fille de
François de la GLIZEULLE et Madeleine de LUXEMBOURG. Or, selon un article
érudit, cette dernière serait fille naturelle de Charles, évêque de Laon[21],
et descendante des prestigieuses familles de CHATILLON, d’ENGHIEN ou de BAR,
mais aussi de la famille des BAUX, établie en Italie méridionale à la suite de
l’arrivée sur le trône de Naples de Charles d’Anjou, et qui s’unit à de grandes
familles italiennes. On trouverait ainsi dans l’ascendance de Madeleine de LUXEMBOURG
les ORSINI (qui ont donné de nombreux papes), les CELANO ou les AQUINO (la
famille de Saint Thomas d’Aquin)[22].
Les autres familles de l’ascendance ont une « coloration plus
nordiste ». On y retrouve entre autres les WAUDRIPONT, d’ASSIGNIES ou de
TOURMIGNIES[23].
A
noter tout de même que par sa mère, Antoinette de ROCOURT, le laboureur Louis
BILLEAU, époux d’Isabeau, descendait pour sa part du fameux couple souche
Antoine du PAYAGE et Hélène MALET de COUPIGNY bien connu des généalogistes de
la région…
Charlotte Thérèse de
MAREVOORDE °ca1660 +1717 (Bergues)
A
Bergues, c’est Charlotte Thérèse, Dame de Wastine, Neuffief et Brunevelt, qui
relie les tisserands DESACY à l’ancienne noblesse flamande au travers de son
mariage avec Eusèbe de SACY/DESACY en 1692 à Bergues.
C’est
un état de biens de Furnes en 1758 qui donne le nom des trois maris successifs
de Charlotte Thérèse et de ses descendants, dont les enfants de son 2e
époux Eusèbe, « maître d’hôtel de Monsieur le marquis de Darcourt »
selon un acte du tabellion de Lille. Puis
c’est un acte tiré du relevé de Claude Cerf des Maisons mortuaires de Bergues
qui précise l’ascendance de Charlotte Thérèse. Des trouvailles providentielles
pour retracer la descendance de cette famille de SACY qui s’éparpille des deux
côtés de la frontière franco-belge à Bergues, Hazebrouck, Estaires, Vieux
Berquin, Bailleul, Kemmel, Nieuwkerke, Steenkerke et Sailly sur la Lys,
notamment au sein des familles PLETS et HAVET pour cette dernière commune[24].
L’ascendance
de Charlotte Thérèse nous emmène pour sa part vers Bruges et Gand avec de
nombreuses familles échevinales et anoblies (van der BANCK, BAVE, de BAENST,
ALLAERT) mais cette ascendance comprend également des représentants de
plusieurs branches cadettes de la famille de SAINT OMER, de la famille des
seigneurs de BEVEREN-DIXMUDE[25],
des seigneurs de BERQUIN[26]
ou de celle des van STAVELE, vicomtes de Furnes[27].
Constance du GARANNE 07/02/1608-27/01/1674
(Boulonnais)
La
dernière filiation que je souhaite vous présenter nous fera voyager en France.
Dans de nombreux cas, nous descendons de ressortissants d’autres régions parce
que ces derniers étaient militaires et ont fait souche dans leur ville de
garnison. Ce fut le cas de Bertrand du GARANNE, écuyer, seigneur de Saint
Mézart et Pépieux (actuellement dans le Gers et à l’époque en Gascogne) et
« capitaine d'une compagnie de gens de pieds du régiment de Picardie
tenant garnison en cette ville de Boulogne ». De sa relation avec
Antoinette PANNIER, il aura au moins quatre enfants, dont Constance qui épousa
en premières noces et par contrat de mariage du 29/06/1623 à Boulogne sur mer
Antoine MACQUINGHEN, descendant à la 2e génération de la famille
d’ISQUE seigneurs de Landacre, puis en deuxièmes noces vers 1630 Antoine HENOT
laboureur à Bernieulles (cette union est confirmée par une transaction entre
les descendants des deux lits en 1683 à Samer). De ces deux mariages, Constance
aura au moins cinq enfants et une descendance dans le Boulonnais par les couples
Marguerite MACQUINGHEN et Jean VASSEUR, Jeanne MACQUINGHEN x Antoine LARTISIEN,
Marguerite MACQUINGHEN x Jean DUCROCQ, Marguerite MACQUINGHEN x Antoine HENNEQUIN
ou Jeanne HENOT x Pierre FORESTIER.
L’ascendance
paternelle de Constance plonge pour sa part ses racines en Gascogne et la
rattache aux principales familles de la région, les MONTESQUIOU, les BEON ou les
ASTARAC.[28]
***
Ce
sommaire tour d’horizon de quelques rattachements à la noblesse dans notre
région n’avait d’autre but que de divertir (sûrement) et faire rêver (pourquoi
pas), mais aussi de mettre en lumière quelques aspects intéressants de la
recherche généalogique. Les dix filiations passées en revue dans cet article ne
forment en aucun cas un échantillon représentatif et pourtant elles présentent
deux caractéristiques que l’on retrouverait à plus grande échelle : Un
rattachement à des ancêtres nobles se fait le plus souvent par deux voies. Dans
le premier cas un fils ou une fille naturelle d’un homme titulaire d’un titre
de noblesse, qui s’allie à un(e)
conjoint(e) d’un milieu social plus traditionnel. Dans le deuxième cas le
rattachement se fait au travers de mariages hypergamiques où le plus souvent
l’homme épouse une femme de statut social plus élevé, ici toutes de « nobles
dames ». On connaît rarement les motivations de ces alliances
« déséquilibrées » même si l’on peut supposer que des questions de
patrimoine entrent en ligne de compte.
Certains
cas de figure non étudiés dans cet article, comme celui du censier du Terrail à
Wambrechies, Salomon SIX « dit Thieffries », (en souvenir du
patronyme de sa mère Valentine de THIEFFRIES) montrent combien ces alliances
avec la noblesse pouvait engendrer une fierté certaine chez les familles de
bourgeois ou de censiers enrichis et certainement avides de reconnaissance
sociale.
Pour
conclure, et pour en revenir à l’aspect généalogique pur, un travail sur des
branches nobles est très différent de recherches généalogiques plus classiques
car plus on recule dans le temps, plus ce travail s'apparente à une analyse et
une confrontation de sources imprimées, souvent universitaires ou érudites, ou
de sources archivistiques peu inventoriées et à la paléographie plus complexe
(chirographes ou comptes des argentiers par exemple). Mais que les filiations
soient nobles ou pas, une chose rapproche tous les types de recherche
généalogique : la nécessité de toujours conserver un esprit critique
aiguisé et un recul pour questionner les sources et leur fiabilité….
Je remercie chaleureusement, et par
ordre alphabétique, Didier Bouquet, François Caron, Ferdinand Cortyl et
François Foucart pour leurs précieux apports, remarques et corrections dans la
rédaction de cet article.
Merci également à Bernard Chovaux et Michel
Champagne. Sans leurs travaux respectifs, j’aurais probablement longtemps ignoré
mon propre rattachement aux Bersacques/Longvilliers/Cayeu/Saint Omer...
[1]
Pour un récit détaillé de cette recherche, je renvoie à l’article « Une
nouvelle voie vers la famille de Bersacques et la descendance
carolingienne » parue dans Nord
Généalogie numéro 223 de 2012 et
téléchargeable à https://independent.academia.edu/AntoineBarbry
[2]
Pour une étude de la famille de Bersacques et de sa descendance, je renvoie au
superbe ouvrage de Michel Champagne et Ronald Piers de Raveschoot Histoire
généalogique de la maison de Bersacques. Publication GGRN (AM 539). 2016.
Voir également pour l’ascendance LONGVILLIERS et CAYEU Michel Champagne La châtellenie de Longvilliers du 12e
au 14e siècle. Ses seigneurs et leurs alliances. Publication
GGRN (AM 301)
[3] Il
était l’un des plus fameux bibliophiles de la Renaissance dans les Pays-Bas
bourguignons et sa bibliothèque contenait de nombreux manuscrits précieux. Le
seul ouvrage en français de cette bibliothèque "Le trésorier de
philosophie naturelle des pierres précieuses" par Jean d'Outremeuse de Liège est connu pour
inclure des chapitres interdits par l’Eglise car il traitait de sciences
occultes.
[4]
Quelque lignes dans son article « Bâtards de Brabant et bâtards de
Bourgogne », Revue belge de
philologie et d’histoire. Tome 1 fascicule 2. 1922
[5]
Deux pages sur la « descendance de Raphaël, bâtard de Bourgogne »
dans son ouvrage Les Valois. Kerrebrouck. 1990
[6]
In “Repertorium van de vlaamse adel”.
Academia press. 2011
[7]
Pour plus d’informations sur les actes du tabellion de Douai confirmant la
descendance de Raphaël, on peut se référer au fil gennpdc https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=137121.. (MARCATELLIS Douaisis)
[8]
Mémoire sur les comtes de Ponthieu de la
deuxième race. Alcan Lévy. 1868
[9]
Voir l’article de Marie-Thérèse Désert-Duribreux, « Les seigneurs de
Bourgogne à Marquillies », Revue du
Cercle historique de Marquillies, numéro 12, octobre 2013
[10]
Plus d’informations sur l’ascendance peuvent être consultées sur le fil suivant
du forum gennpdc https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=106577&mode=threaded&pid=631155 (LAURENT
x LOTTE Douvrin)
[12]
Plus d’information sur la descendance et l’ascendance NEDONCHEL sur le fil
gennpdc https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=114032 (de NEDONCHEL Bouvignies et Coutiches)
[13]
Cette famille noble de MASSIET est celle qui a été « victime » d’un
fameux cas d’usurpation de titre par une famille MASSIET d’Hazebrouck,
usurpation qui a donné lieu à un procès au long cours au XVIIIe siècle.
[15]
Dumont
dans ses Fragmens généalogiques. 1776
p.70, et à sa suite Herckenrode dans son Nobiliaire
des Pays-Bas et comté de Bourgogne par de Vegiano et d’Hovel, Gand, 1865,
p. 500 écrivent : "Ce fragment est écrit selon les Mémoires de M. le Comte
de Germicourt, en Artois : Gilles
de Cuinghem, fils bâtard de Gérard, seigneur de Hem, Fresnoy et Bassy, épousa
Catherine de Picavet— Selon les Mémoires de M. le Comte de Beaufort, il était
cinquième fils de Gérard, seigneur de Hem, et de Jeanne de Hingettes, disant
qu'il fut seigneur de Dasveld, et que sa femme Catherine de Picavet était veuve
en 1520. — Du susdit mariage naquirent : (…)Daniel de Cuinghem, seigneur de
Blockhuys, qui épousa Barbe du Bois de Hoves, de laquelle il eut une fille,
Claudine de Cuinghem, mariée à Guillaume le Brun(…)
De son côté, Sars de Solmont (étude de la famille Cuinghem)
fait bien de Gilles un fils légitime de Gérard et Jeanne de Hingettes, tout
comme Denis du Péage dans ses Notes
généalogiques sur quelques familles d’Artois et de Flandre. Tome I, pages 7
à 19
[16]
Ms 601. Folio 131 : Gilles de Cuinghien bastard de
Hem bailly de la Srie des Obeaux (communication
de François Foucart que je remercie chaleureusement)
[17]
Plus d’informations sur l’excellent site internet de Ludovic Ledieu à la page https://lledieu.org/?p=adrien+francois&n=fromentin
[18]
Dont l’ascendance agnatique est consultable sur le blog d’un descendant
(néerlandophone) d’Anne Marie https://genealogischeverkenningen.wordpress.com/2018/12/25/aanzet-genealogie-de-gherbode/
[19]
Voir l’article « La famille
Paeldinc (Anguille) à Ypres du XIIIe au XVe siècle « paru dans la revue Westhoek en mai 2015 et téléchargeable
à https://independent.academia.edu/AntoineBarbry
Le 11/2/1631 fut baptisée par maître Pierre
LESTREE par permission Marie Iolente BILLIAU fille de Loys et d’Isabeau
SAINGENOIS de fornication, laquelle ont levé ledit baptisant et D. Iolente
HERNU
[21]
Me Henri Descharmes « Les de Raincourt ». Revue historique du plateau de Rocroi. 1934. Je n’ai pour le moment
trouvé aucune autre source confirmant cette filiation mais l’on connaît par
ailleurs d’autres enfants naturels à Charles de Luxembourg, évêque de Laon
(communication de Christophe Yernaux)
Du Chastel de la Howardrie, par contre, ne donne pas
l’origine de Madeleine de Luxembourg dans son étude de la famille de la
GLISEULLE. Notices généalogiques
tournaisiennes. Tome II. Page 112 consultable sur le site de Ferdinand
Cortyl http://genescan.free.fr/Genealogistes/DuChastel/GeneTournais_T2/original/GeneTournaisT2_112.html
[22]
J’ai beaucoup travaillé ces familles d’Italie méridionale qui font partie de
l’ascendance de mes enfants et je tiens mes travaux à la disposition des
personnes intéressées.
[23]
L’ascendance BILLEAU-SAINT GENOIS reconstituée par Didier Bouquet est
consultable sur le fil gennpdc https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=33313&st=0 (CAULLET x DUBRULLE Beuvry)
[24]
Plus d’informations sur les fils gennpdc suivants https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=119732&hl=desacy
(DESACY Estaires) et https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=120071&hl=marivoorde
(de MARIVOORDE x LOTTIN région de Bergues)
[25]
Voir à leur sujet mon article « Les van Dixmude d’Ypres descendent-ils des
seigneurs de Beveren ? » paru dans Nord Généalogie numéro 220 de 2011
[26]
Dont la généalogie avec la descendance vers les DESACY figure sur le site http://home.scarlet.be/r.berquin/branche1.html
[27]
Que j’étudierai ainsi que ses alliances dans un prochain article
[28]
Pour cette filiation consulter les fils gennpdc https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=72668&mode=linear
(MACQUINGHEN
x MACQUINGHEN Lacres) et https://www.gennpdc.net/lesforums/index.php?showtopic=77473&st=0&start=0 (du GARANNE d’Astarac en Boulonnais)