FRANCAIS

L'histoire en tant que science et champ d'études est en pleine mutation.
Grâce aux apports constants de l'archéologie, de la génétique, ainsi qu'à la confrontation avec d'autres sciences humaines (anthropologie, sciences sociales) ou "sciences dures" (démographie, biologie, statistiques) ce que l'on pensait acquis sur l'histoire et la généalogie des peuples est constamment enrichi et remis en question.
Ce blog a pour objet d'informer sur certaines découvertes qui modifient (ou pourraient modifier) nos connaissances sur nos ancêtres, des premiers homo sapiens jusqu'à nos grands-pères...


ENGLISH

History as a science and a field of study is undergoing significant changes.
Thanks to the contribution of archaeology, genetics, as well as exchanges with other human sciences (anthropology, social sciences) or "hard sciences" (demography, biology, statistics), historical and genealogical facts that were once considered to be established or "written in stone" are now being questioned, revised and enriched.
The aim of this blog is to inform and discuss current discoveries that modify (or could modify) what we know about our ancestors, from the first homo sapiens to our grandfathers...



lundi 17 octobre 2022

LA FAMILLE NOBLE DE LA CERDA : DE L’ESPAGNE AUX PALAIS SICILIENS

 

Depuis que Luchino Visconti a ébloui le monde avec son film « Le Guépard », la noblesse sicilienne garde une aura qui ne se dément pas. Son mélange de faste, de raffinement anachronique, ainsi que de nostalgie de fin d’un monde est un mélange qui continue de fasciner bien au-delà des amateurs d’histoire ou de Sicile.

Il y a eu le livre « Le Guépard » de Giuseppe Tomasi, prince de Lampedusa, mais aussi « I Viceré » de Federico de Roberto, ainsi que des témoignages de première main de personnes qui ont vécu cette vie de palais sicilien dans leur jeunesse. C’est le cas du fameux joaillier et designer de bijoux Fulco di Verdura, de son vrai nom Fulco Santostefano della Cerda, duc de Verdura, né près de Palerme en 1898 et décédé à Londres en 1978.

Né du mariage entre le marquis Giulio Santostefano della Cerda et Carolina Valguarnera, fille du prince de Niscemi, il est par cette dernière famille cousin de Tomasi di Lampedusa, l’auteur du roman « Le Guépard ».

Dans son récit autobiographique « The happy summer days : a sicilian childhood » publié à Londres en 1976, Fulco di Verdura évoque sa jeunesse qui, à nous semble tirée tout droit d’un film de princes et de princesses, mais qui était la réalité de la noblesse sicilienne jusqu’au début du XXe siècle. La génération de Fulco est celle qui a connu les derniers feux de cette classe aristocratique, c’est pourquoi son livre se lit comme l’histoire d’un monde disparu.

Dans ce livre il évoque notamment  sa famille paternelle d’origine espagnole, les San Esteban y La Cerda italianisés en Santostefano della Cerda. Ce passage de son autobiographie m’intéressait au plus point car mon épouse descend de cette même famille et j’espérais y trouver des informations qui me feraient remonter dans le temps mes recherches généalogiques.

Je fus cependant bien déçu. Fulco évoque bien son lointain ancêtre, le roi Alfonso X de Castille et son fils Fernando, « el de la Cerda », qui avait épousé Blanche, fille du roi de France Louis IX, dit Saint Louis. Lorsque Fernando mourut, ses fils étaient trop jeunes pour régner. On désigna leur oncle Sancho comme régent mais celui-ci usurpa le trône. C’est pourquoi Alfonso, l’aîné des fils de Fernando, eut désormais comme surnom « le deshérité ». Ils tentèrent en vain de récupérer leur trône, on leur donna en échange le duché de Medinaceli et ils gardèrent pour la vie le surnom de leur grand père « de la Cerda » (que l’on pense avoir été attribué parce que Fernando était poilu comme un cochon !) qui devint leur nom patronymique.

Malheureusement, Fulco dans son récit sautait tout en grâce les générations intermédiaires pour arriver aux de la Cerda établis en Sicile. La particularité de leur patronyme garantissait leur origine commune mais les individus qui reliaient Alfonso de la Cerda à ses descendants siciliens demeuraient dans le plus grand brouillard…

Vous imaginez la frustration du généalogiste qui voit la perspective de se rattacher aux rois d’Espagne et à Saint Louis mais qui n’arrive pas à combler le fossé… Pendant plusieurs années je cherchais vainement à retrouver trace de ce Girolamo de la Cerda, « Capitano Giustiziere di Palermo nel 1589 » et issu « del ducato di Medinaceli ». Le marquis de Villabianca, dans son ouvrage de référence « Della Sicilia nobile », décrivait l’épitaphe très détaillée du monument funéraire des ancêtres de Fulco et de ma femme, Diego de Santesteban et Ippolita de La Cerda, morts respectivement en 1633 et 1626. On y apprend que Girolamo, le père d’Ippolita, est originaire de Caceres (Espagne), qu’il était capitaine de cavalerie et que le patronyme de sa propre mère était « Holahuin ».

Bien plus d’informations que l’on en trouve généralement sur nos ancêtres lointains ! Mais malgré ces pistes multiples mes recherches restaient vaines…

Jusqu’à la découverte providentielle (et récente) d’une mention dans l’index de la collection de documents du fameux généalogiste espagnol Salazar y Castro où on lit le texte suivant :

Otra del emperador ( Fernando I ] a Felipe II , en recomendación del capitán Jerónimo de la Cerda , [ natural de Cáceres ] , hijo de Hernán Pérez Golfín , maestresala que ha sido de dicho emperador , y nieto de Sancho de Paredes (Golfin, camarero de los Reyes catolicos) para que le haga alguna merced.  17/12/1562

Cette courte mention nous débloque l’ascendance de la Cerda et nous donne deux générations supplémentaires ! On y apprend en effet que Geronimo (Jeronimo en espagnol) est fils de Hernan Perez Golfin, « maître de salle » de l’Empereur Felipe II, et petit-fils de Sancho de Paredes, « serveur » des Rois Catholiques (le roi Ferdinand d’Aragon et la reine Isabel de Castille donc).

Muni de ces nouvelles informations, je profitais des recherches poussées faites sur les familles de Caceres par le Club Universo Estremeño de cette ville, en particulier le tableau de la famille Golfin disponible à

https://www.flickr.com/photos/bibliotecavirtualextremena/50123620511/in/photostream/

Hernan Perez Golfin, le père de Girolamo, avait épousé une Isabel de La Cerda, elle-même petite-fille d’une autre Isabel de la Cerda. Six générations au-dessus de cette dernière, j’arrivais à Luis de la Cerda qui, avec son épouse Leonor de Guzman, avaient été nommés par le roi d’Espagne roi « des îles Fortunées » c’est à dire des Canaries en 1344, ce qui ne valait pas grand-chose puisqu’à l’époque les Canaries n’avaient pas encore été conquises… Luis était lui-même le fils du fameux Alfonso « le deshérité ». La boucle était bouclée, Fulco pouvait sourire là où il était, je l’avais enfin relié à Alfonso XI et Saint Louis, et ma femme par la même occasion !

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